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Prix de thèse de la MSHS-T : deux docteurs UT2J récompensés
Publié le 3 novembre 2020 – Mis à jour le 6 novembre 2020
Théo Soula (PLH) est lauréat 2019 pour sa thèse sur Jacques Réda. Nils Le Bot (LISST/Université de Potsdam) est lauréat 2020 pour sa thèse sur le devenir des gares métropolitaines en France et en Allemagne. Ils reviennent sur leurs travaux de recherche.
La Maison des Sciences de l’Homme et de la société de Toulouse décerne chaque année un prix de thèse visant à distinguer des travaux de recherche interdisciplinaires remarquables. Au moins une discipline du domaine des sciences humaines et sociales doit être au cœur du travail.
Cette année, les prix de thèse 2019 et 2020 ont été annoncés simultanément.
Pour l’édition 2019, Théo Soula est récompensé pour sa thèse intitulée : "Le Flâneur mégapolitain. Géographie littéraire de Paris dans l’œuvre de Jacques Réda."
Soutenue en novembre 2018, Théo Soula a réalisé sa thèse, mêlant littérature et géographie, sous la direction de Jean-Yves Laurichesse, professeur au laboratoire PLH et Muriel Rosemberg, de l’Université de Picardie-Jules Verne.
Trois questions au lauréat 2019
- Quels objectifs revêt votre travail de thèse ?
Théo Soula : Les objectifs de la thèse que j'ai soutenue en 2018 étaient doubles, et correspondaient à deux types d'approches qui me tiennent à cœur, et que l'œuvre urbaine de Réda m'a heureusement permis de réunir. D'une part, je voyais un intérêt fort à étudier cette œuvre sur le plan monographique. Les quelques bonnes thèses qui existaient sur le sujet adoptaient toutes un angle général, et il me semblait qu'en restreignant le corpus à la question de la ville et de la flânerie, je pouvais apporter ma contribution à cette histoire critique de l'œuvre de Réda. D'autre part, je n'ai jamais perdu de vue mon goût pour l'interdisciplinarité, qui s'était manifesté lors de mes études par une hésitation constante à me former à telle ou telle discipline, et en particulier la géographie. En reprenant la notion de "géographie littéraire", formalisée par Michel Collot, je pouvais donc pousser le plus loin qu'il me semblait possible cette conjonction des discours, entre étude littéraire et étude géographique, avec toutes limites méthodologiques et épistémologiques que cela impose.
- Comment appréhendez-vous le caractère interdisciplinaire de votre travail ?
L'interdisciplinarité est à la fois un point de vue pluriséculaire, et un champ d'étude en plein essor. Elle s'inscrit dans l'histoire longue de l'idéal encyclopédique, et est pratiquée en tant que telle par un très grand nombre de chercheurs. Mais elle connaît aujourd'hui une ferveur épistémologique nouvelle. La question n'est plus tant de savoir comment on peut convoquer différentes disciplines autour d'un même sujet, la question est de savoir comment produire un discours qui ne relèverait ni exclusivement d'une discipline, ni exclusivement d'une autre, ou des deux à la fois. Cette évolution est structurée par la méfiance nouvelle autour de la discipline comme outil de pouvoir : pour de nombreux chercheurs, l'objectif est de se passer des cadres disciplinaires (la transdisciplinarité). Dans mon cas, j'ai préféré en rester à une approche disciplinaire des savoirs, et postuler qu'il existe un moyen de tenir un discours qui intéresse scientifiquement les géographes et les littéraires, et que les deux peuvent également comprendre. Pour cela, il faut impérativement d'abord se donner des outils d'étude qui relèvent des deux champs, et tenter de trouver un entre-deux du savoir.
- Que représente ce prix pour vous ?
Je suis particulièrement heureux de recevoir ce prix pour deux raisons : d'une part il récompense la dimension interdisciplinaire de mon travail, qui est un point sur lequel j'ai particulièrement insisté et qui me tenait à cœur. D'autre part, c'est mon côté chauvin, je suis très content de m'inscrire dans le patrimoine de la Maison des Sciences de l'Homme et de la Société de Toulouse. Un prix de thèse est une reconnaissance institutionnelle qui ne peut que flatter un chercheur, et celui de la MSHS-T représente un vrai gage de qualité.
Pour l’édition 2020 est récompensé Nils Le Bot pour sa thèse intitulée : "Quel avenir pour les gares métropolitaines françaises et allemandes ?" - Analyse prospective de la dialectique « système gare » / ville, face au devenir des politiques publiques françaises & allemandes en matière de transport.
Dans le champ de l’aménagement de l’espace et de l’urbanisme et soutenu en septembre 2019, son travail a été réalisé sous la direction de Jean-Pierre Wolff, professeur émérite au laboratoire LISST et Manfred Rolfes, Institut für Umweltwissenschaften und Geographie, Universität Potsdam.
Trois questions au lauréat 2020
- Quels sont les objectifs de votre travail de thèse soutenu fin 2019 ?
Nils Le Bot : Ma thèse est partie d’un constat assez simple. Face aux enjeux climatiques, les ambitions de réduction drastiques des émissions de gaz à effet de serre à horizon 2050 impliquent une transition mobilitaire, où la place du ferroviaire (et des gares pôles échanges en particulier) est centrale. Mais la congestion des métropoles, la saturation des gares centrales et l’intégration des infrastructures sont autant de questions qui peine à trouver des réponses. De même qu’il y a urgence à penser la ville, je pense qu’il y’a urgence à penser la gare au XXIe siècle.
D’aucuns souhaiteraient aujourd’hui les voir « disparaître », pour ce qu’elles ont de sale, de bruyant, de contraignant (congestion, seuils, règles...), de trop fonctionnel... et à la fois les voir persister, dans ce qu’elles offrent de plus convenu, de plus socialement acceptable et de moins subversif : le commerce et l’animation. Je propose d’une troisième voie, en convoquant les hétérotopies de Michel Foucault. C’est un travail qu’il me faudrait prolonger, mais les bases sont là. Au-delà d’une réflexion sur l’objet urbain, ma thèse porte également en elle une démarche prospective, résolument critique, sur l’avenir des mobilités, sur la pertinence des innovations urbaines (notamment numériques), et sur le sens donné aux politiques urbaines au sens large.
- Quelle en est l'originalité ?
Sans que cela soit forcement original, j’ai sincèrement cherché à faire converger une approche très théorique et des résultats opérationnels. Situé à la rencontre de la géographie, de l’architecture et de l’urbanisme, mon travail de recherche mobilise des outils d’analyses historiographiques, sociopolitiques et systémiques pour étayer un positionnement holistique. Mon objectif était de déceler des mécanismes urbains, en abordant la gare et son environnement urbain, comme un ensemble systémique.
Si je pars d’une formalisation théorique forte, notamment sur le sens à donner à l’urbanité des gares et à leur chronotopie, ma recherche débouche également sur une série de concepts opérationnels, comme les orchestres de gares et les réseaux de gares interconnectées. Ces derniers offrent des possibilités d’actions immédiates pour les objets d’études concernées et pour toute une série de gares métropolitaines dans le monde.
- Que représente ce prix pour vous ?
Je suis particulièrement touché et honoré. Soutenir une thèse de doctorat n’avait rien d’évident pour moi lorsque j’ai commencé mes études. Recevoir ce prix est donc une forme d’accomplissement renouvelé. Je souhaite évidemment remercier l’université et mon directeur de thèse, le Professeur Wolff, pour m’avoir permis d’étudier avec beaucoup de liberté, ainsi que mon entreprise, AREP (filiale de SNCF Gares & Connexions), qui a financé une grande partie de ce travail. J’aimerais vivement pouvoir publier un condensé de ce travail, et j’espère que ce prix me permettra de trouver l’aide nécessaire.